L’utilisation de médiateurs thérapeutiques modifie-t-elle la représentation de la fonction soignante ? (2)
Nadine Chastagnol, coordinatrice générale des soins.
Nadine Chastagnol insiste sur la diversité des médiations thérapeutiques. Une pluralité de médiateurs, infirmiers, rééducateurs ou professionnels sociaux éducatifs co-animent avec des psychothérapeutes des activités variées : ateliers d’écriture, cuisine, musique, poterie… La médiation thérapeutique fait appel à la créativité des professionnels, en cela réside toute sa force. Sa vocation première : aménager des temps de prise en charge des patients et non des temps récréatifs. Cette journée a pour ambition d’éclairer cette prise en charge particulière. Nadine Chastagnol invite le public à aiguiser sa curiosité en participant aux débats.
Muriel Lycke, cadre supérieur de santé, direction des soins
Pour cadrer cette seconde journée d’enseignements cliniques de l’année 2014, Muriel Lycke brosse à grands traits les éléments marquants de la journée précédente. Elle en profite aussi pour rappeler les objectifs de ces journées d’échanges entre professionnels en exercice et futurs professionnels de santé.
Cette année, trois journées sont organisées autour d’un même thème : la médiation thérapeutique.
En février et en mai, les intervenants s’adressent aux étudiants. L’idée sous-jacente de ces enseignements : les intéresser à la psychiatrie, les sensibiliser. Quels que soient leurs lieux d’exercice futurs, sans doute auront-ils une écoute bienveillante auprès des patients, « psy » ou pas. En tout cas, ils seront mieux armés pour les aider, les orienter. Au final, ces journées sont autant d’occasions de parler de la psychiatrie sur un mode moins dramatique que celui véhiculé par la presse en général.
En novembre prochain, la journée sera destinée aux professionnels, jeunes ou plus anciens. Muriel Lycke et son équipe cherchent à favoriser les rencontres entre soignants, qui exercent souvent loin les uns des autres, au sein de structures ambulatoires. L’opportunité leur sera donnée de parler de leurs pratiques, d’initier des projets, de faire naitre des idées autour d’une interrogation simple « aujourd’hui, quel sens donner à leur pratique avec la médiation ? ».
Au cours de la synthèse de la précédente journée, Muriel Lycke met l’accent sur les éléments importants qui fondent la médiation thérapeutique.
Historiquement, ce type de prise en charge a connu une longue évolution, dont le site de Neuilly-sur-Marne, avec ses bâtiments anciens, chargés d’Histoire, témoigne encore. Au départ, peu de molécules, d’usage complexe, peu de propositions thérapeutiques. Des activités agricoles se sont développées en sein de cette enceinte. Une ferme d’élevage de cochons, où travaille un certain nombre de patients hospitalisés : voici l’embryon des futures médiations thérapeutiques. Aujourd’hui, l’échange de la parole, l’expression des symptômes passe par quelques-chose qui fait tiers. Mais l’approche proposée par les intervenants est plus subtile. Peu importe le médiateur choisi. Une simple promenade peut suffire à libérer une parole. Le résultat est aléatoire, toujours surprenant. Quoiqu’il en soit, le matériel de travail essentiel à toute médiation est l’engagement du soignant. Un engagement professionnel fort, qui lie le praticien à sa fonction.
Se poser les bonnes questions pour mettre ne place une activité thérapeutique
Véronique Carret, cadre de santé, IFSI
Yamina Caldarola, cadre de santé, hôpital de jour, pôle 93G10
Béatrice Laligue, cadre de santé, pôle 93 G 18
Organisatrices de ces journées, elles proposent ici un exercice à trois voix. En partant de l’expérience singulière d’une étudiante en soin infirmier (dont Béatrice Laligue se fait le porte-voix), et de son atelier « maquillage coiffure », mais aussi d’une activité « repas thérapeutique » mise en place à l’hôpital de jour depuis plusieurs années, elles effectuent un retour sur les apports théoriques et exposent les compétences à mobiliser dans ce type d’exercices.
Les activités thérapeutiques font partie intégrante de la pratique infirmière, elles sont régies par le code de santé public et nécessitent une préparation. Alors, quelles sont les bonnes questions à se poser avant de mettre en place une activité ? Il est question d’affinité avec le médiateur, de partage de savoir-faire, de plaisir aussi. Le soignant sait faire la cuisine et aime ça, il s’orientera plutôt vers un atelier « préparation des repas ».
Le « savoir être » au cours de cet atelier, l’implication du soignant ne s’enseignent pas. Il faut néanmoins garder la distance thérapeutique nécessaire en fixant des orientations précises. Qu’attendons-nous de l’activité ou du groupe ? Quels sont les objectifs ? Quel est l’intérêt ? Pour quel patient ? Quand l’organiser ? Dans quel cadre ? Qui peut intervenir ? Quels seront les modalités d’exécutions ?
Toutes les activités ne conviennent pas à tous les patients. Rappelons que l’indication thérapeutique se discute d’abord en équipe avec les soignants.
Au cours de son stage, l’étudiant en IFSI se voit fixés des objectifs par son institution de rattachement, souvent en lien avec ses unités d’enseignements. Durant son expérience pratique, il doit aussi viser un objectif professionnel qui lui est propre. Parfois, comme c’est le cas dans l’hôpital de jour où exerce Yamina Caldarola, certains cadres en exercice invitent l’étudiant à poursuivre des objectifs plus précis. En l’occurrence, Une étudiante en soins infirmier devait proposer un atelier de médiation thérapeutique. Un exercice de réflexion particulièrement formateur, mais aussi une exigence d’écriture car elle devait le formaliser par écrit.
Véronique Carret, Yamina Caldarola et Béatrice Laligue décryptent le projet de l’étudiante en le scindant par compétences mobilisées. Cette analyse a pour ambition de donner des clés de réflexions à l’auditoire. Chaque étudiant doit être en mesure de guider son autoévaluation. Il doit devenir acteur et contributeur de sa formation. Le savoir théorique n’est là que pour éclairer la pratique. En fonction du principe selon lequel « ce n’est pas parce qu’on a appris, qu’on sait faire », il est indispensable de faire le lien entre la théorie et les attentes du terrain, les compétences thérapeutiques à mettre en œuvre. Se les approprier permet à l’étudiant de les transposer dans n’importe quelle autre réalité professionnelle.
Béatrice Laligue estime par exemple qu’un soignant doit aiguiser son sens de l’observation.
Le patient ne dit pas, il donne à voir. Au cours d’une activité scrabble, une patiente n’avait proposé que des expressions en lien avec la loi, « culpabilité… ». Le soignant a observé cette attitude et l’a rapidement associé au fait qu’elle avait fait de la prison. Par la suite, cet évènement a pu être discuté avec son thérapeute. Cette analyse du soignant a contribué à orienter la prise en charge du patient.
Véronique Carret souligne qu’en psychiatrie en général, et plus particulièrement lors d’une médiation thérapeutique, il faut oser, se risquer.
Le choix du médiateur peut-il influencer la resocialisation du patient ? Apprendre à se maquiller pour reparaitre en public, jouer au scrabble pour retrouver le chemin de l’écriture ?
La médiation thérapeutique n’a pas cette vocation. Le médiateur protège. Il permet d’entrer en relation avec le patient sans être entrainé dans sa psychose. On cherche à instaurer une permanence dans la vie en pointillés du psychotique. Les ambitions sont parfois plus modestes. Le groupe est une micro-société. Le regard des autres membres du groupe est fondamental. On est déjà dans une forme de resocialisation.
Le sport, un outil thérapeutique parmi d’autres
Bruno Leredde, cadre socio-éducatif, service des sports (ASVE)
Olivier Davanture, infirmier, service des sports (ASVE)
Estelle Belhassen, éducatrice spécialisée, service des sports (ASVE)
Au départ éducateur spécialisé, Bruno leredde détient plusieurs diplômes sportifs. Maître-nageur sauveteur, détenteur d’un brevet d’état en natation et moniteur d’escalade, il travaille aujourd’hui du service des sports de Ville-Evrard et retrace son historique et ses missions.
Historiquement, l’utilisation du sport dans la prise en charge des patients n’est pas un phénomène nouveau.
Au départ, on organisait des rencontres de football à l’intérieur de chaque pavillon. Puis les matchs inter-pavillons se sont organisés. Finalement, le cercle s’est élargi et à l’initiative de Paul Sivadon et un match de football entre Ville-Evrard et Fleury les Aubrais s’est tenu dès 1948. À l’époque, l’activité était d’avantage perçue comme occupationnelle que thérapeutique.
Crée en 1963 par un infirmier ergothérapeute, le service des sports de Ville-Evrard est un service inter-sectoriel. Il est accessible à tous les patients pris en charge par l’institution : enfants, adultes et adolescents. Pour participer, deux certificats médicaux sont nécessaires. Le premier, classique, indique qu’il n’existe aucune de contre-indication médicale à la pratique du sport. Le second, plus spécifique, est une indication thérapeutique de leur psychiatre.
Les activités qui leur sont proposées sont adaptées à leurs pathologies et s’inscrivent dans un projet de soin élaboré avec l’équipe pluridisciplinaire de l’unité dont ils dépendent. Un patient qui se présente seul, est renvoyé vers le médecin et son équipe. Le sport n’est plus considéré comme uniquement ludique. Il est une médiation thérapeutique à part en tiers, avec une exigence de régularité et de suivi. Le service des sports fonctionne avec des référents dans chaque pôle, voire dans chaque unité de soin. Infirmiers, éducateurs spécialisés, psychomotriciens, ergothérapeutes, psychiatres, aides-soignants, tous effectuent un travail d’observation, de transmission et d’évaluation du patient.
Aujourd’hui, le service des sports propose une grande variété d’activités, depuis la simple marche à pied, jusqu’au séjour à voile. Pendant huit jours, les soignants et les patients partagent alors leur quotidien dans un espace confiné, huit personnes dans huit mètres carrés. Une réelle aventure humaine.
Olivier Davanture, infirmier, témoigne de ses quinze ans d’expériences au sein du service des sports.
Les outils de travail changent, on troque la blouse par un ballon de foot.
D’après son expérience, Olivier Davanture constate que la blouse et les clés peuvent contribuer à modifier ou dégrader la relation. On incarne les interdits, la contrainte. Le sport en soi revêt peu d’importance, il facilite la relation thérapeutique. C’est quasiment un piège un pour le patient,
On ne prévoit pas tout : la pluie, le vent, les embouteillages. Cet aléa est précieux. Gérer l’inattendu provoque le discours. Tous les moments sont riches : le transport jusqu’au stade, un moment plus intime, le repas du midi, systématiquement en extérieur, la douche après match, une forme de « poilo-thérapie » où on assume son corps au sein du groupe, patients et soignants au diapason.
Olivier Davanture respecte une forme de distance thérapeutique, mais d’après lui, les protocoles entravent plus qu’ils ne cadrent. Par ailleurs, il souligne que le sport n’est pas un soin à haut risque, jamais il ne fait pas décompenser le patient.
Estelle Belhassen, éducatrice spécialisée et monitrice d’escalade, présente une vignette clinique en pédopsychiatrie : une activité escalade. « L’escalade ou l’ascension vers soi ».
L’objectif de l’escalade est d’atteindre le sommet en empruntant des trajectoires plus ou moins difficiles : des voies. Il s’agit de coordonner ses mouvements pour assurer l’équilibre du corps. L’assureur garantit la sécurité du grimpeur via la corde.
Il existe quelques contre-indications à cette activité : les enfants qui, face à leur angoisse, se désorganisent et coupent la relation avec l’adulte, ceux qui mettent le cadre trop à mal ou encore certains autistes dont les angoisses corporelles sont trop importantes. Sinon, les indications sont multiples et beaucoup d’enfants souffrant de troubles psychiques sont aptes à suivre cette activité.
La corde constitue un lien entre le grimpeur et l’assureur. Cela signifie une perte de liberté, elle impose une communication, une forme de confiance : autant de pistes de travail thérapeutiques.
Pour qu’une activité fonctionne, il faut qu’elle soit inscrite dans le cadre institutionnel, dans le parcours thérapeutique de l’enfant. C’est important pour gérer le potentiel anxiogène de l’activité, avant et après l’activité.
On forme des groupes de 4 à 6 enfants, avec des accompagnateurs. Ils pratiquent l’activité une fois par semaine. La séance est subdivisée en différents temps : arrivée, équipement, escalade, collation… Le cadre est très structuré, il rassure face à une activité qui peut effrayer.
Fodel a 8 ans et son histoire est déjà compliquée. 3ème d’une fratrie de 4 enfants, ses parents ont des antécédents de troubles psychiques et de toxicomanie. Placé à 18 mois, Fodel a connu plusieurs familles d’accueil. Il parle de maltraitance, manifeste une intolérance à la frustration, fugue. Ses troubles du comportement s’accentuent et il est définitivement déscolarisé. C’est à ce moment qu’il passe huit mois à la Nacelle et rencontre l’escalade.
Au départ de son hospitalisation, Fodel réclame des entretiens avec son thérapeute mais semble dans l’impossibilité de profiter de ce moment. Il ne tient pas en place, attaque le médecin et les infirmiers, les séances sont écourtées. On propose à Fodel de suivre en parallèle l’activité escalade, accompagné par des infirmiers, la psychomotricienne de service et la psychiatre référente.
Pendant l’activité, il est persévérant, à l’écoute, sensible à la valorisation émanant des encadrants, capable de demander de l’aide. Par ailleurs, les entretiens se passent mieux. Au cours de l’un d’entre eux, il découvre dans le coffre à jouets des maillons en plastique. Il se fabrique un baudrier et l’enfile : « maintenant je suis en sécurité, je peux parler ». Il l’utilisera à chaque séance et pourra investir cet espace de parole pour verbaliser ses états d’âme. Lors du dernier entretien, il construit un second baudrier, qu’il offre à sa psychiatre référente : « ce baudrier est pour toi, je n’en ai plus besoin. »
La réflexion clinique a permis à l’équipe d’ouvrir de nouvelles pistes de travail et de sortir d’un cercle de méfiance, de rejet. Un mode relationnel connu de l’enfant et qu’il avait reproduit dans l’institution.
De son côté, l’enfant a pu accéder à une prise de risque maitrisée. Physiquement « assuré », rassuré, il a pu revivre des épisodes traumatisants, sans se mettre en danger.
La salle questionne :
• Comment garder la bonne distance avec le patient, dans une telle situation « hors cadre » ?
Il faut trouver une adéquation avec le patient, grâce au travail d’équipe. La distance protège mais elle peut empêcher le lien. Et puis, nous ne sommes pas, hors cadre, le service des sports impose son propre cadre. Estelle Belhassen, en tant que femme, en contact avec une population masculine, doit conserver une nécessaire distance. Même en maillot de bain, elle impose sa position de soignante, dans son discours, son attitude. Une compétence qui s’acquiert avec les années.
• Existe-t-il des sports déconseillés et d’autres bienvenus ?
D’expérience, le ping-pong est anxiogène. Une compétition un contre un, devant un public, peut dégénérer. Le football est plus collectif, on y travaille la relation. Il est vrai qu’il peut exister des contre-indications, mais on réfléchit en amont avec l’équipe soignante. Il faut aussi que le patient ait envie de pratiquer l’activité. Un tétraplégique a voulu essayer l’escalade. Pourquoi pas ? Il faut juste mettre en place les moyens nécessaires.
Les médiateurs thérapeutiques : un véritable atout dans la prise en charge thérapeutique
Estelle Gatard, Samaï Tamini, infirmières, pôle 93G05
Corinne Verger, Evelyne Couvé, infirmières, pôle 93G15
Deux équipes de psychiatrie générale adulte reviennent sur la prise en charge commune d’un patient hospitalisé à temps plein et qui se rend quotidiennement à l’unité groupe séquentiel.
Comment faire avec des patients « sur-adaptés » à l’institution ? Comment relancer un dynamisme quand le personnel soignant est à court d’idées, qu’il s’épuise après de longues années de prise en charge ? En collaboration avec les soignants des pavillons, le Groupe séquentiel se charge en majorité des activités thérapeutiques des malades dits « chroniques ».
C’est le cas de Mr D., aujourd’hui âgé de 46 ans et dont la première hospitalisation à Ville-Evrard remonte à 1994. Après un grave passage à l’acte en 1996 (un homicide sur la personne de sa sœur) et de nombreuses hospitalisations dont certaines en chambre d’isolement, il évolue avec l’institution. Les hospitalisations continuent de jalonner son parcours, parfois en ambulatoire. Il agresse des membres du personnel infirmier en 2000. En 2006, il se marie et devient père de deux enfants. Mais, à la suite du décès d’un proche parent, il renoue avec la violence, et notamment à l’égard de sa femme. Il est hospitalisé à nouveau à temps plein en 2009. Afin de l’aider à mieux vivre son hospitalisation, il est présenté au groupe séquentiel situé à proximité du pavillon où il est hospitalisé. Il faut passer la main, changer le point de vue, une collaboration entre équipes soignantes s’impose. Il intègre le Groupe Séquentiel et débute ses activités thérapeutiques en avril 2011.
S’instaure alors un travail de revalorisation du patient par la création artistique : atelier sculpture, peinture. Il participe à l’élaboration des repas thérapeutiques, les groupes de parole, les activités libres souvent ludiques… Finalement, il partage autre chose que la maladie, le rapport à l’autre diffère. Il a trouvé un réel équilibre entre les deux structures, le pavillon et le GS, deux lieux différents mais complémentaires. Il s’épanouit, se responsabilise, se stabilise. C’est un patient qui s’inscrit aujourd’hui dans le désir, dans le projet, même sur le long terme.
Les patients chroniques sont dans une dynamiques mortifère et entraine un peu les soignants dans cette spirale. Pourtant rien n’est figé, il faut permettre d’être du côté de la vie. Ramener le patient vers la vie, c’est un peu la mission du soignant.
Les soignants et l’activité thérapeutique
Héloise Wagner, Mathilde Tomat, infirmières, pôle 93G18
Ces deux infirmières exposent leurs expériences à travers une vignette clinique. Elles soulignent les difficultés de l’exercice et analysent les implications de leur double fonction : soignant du quotidien et animateur d’activité thérapeutique.
De nombreuses activités sont pratiquées au sein de l’unité durant la semaine. On en compte treize en tout. Deux activités animées par des intervenants extérieurs : dessin et danse et percussion et trois activités animées par des psychologues et le chef de pôle (un psychiatre) : écriture, lecture, collage. Le reste des activités sont proposées par les infirmiers et les aides-soignants : pâtisserie, esthétique, vélo, jardinage, ping-pong, foot, jeux de société et baby-foot. C’est dans ce cadre que ses situent les deux intervenantes.
En intra-hospitalier, il est compliqué de maintenir des activités en continu, tant les constantes sont irrégulières. Il faut collaborer avec une multiplicité des soignants référents, sans roulement et horaires fixes. La semaine de travail ne se réduit pas du lundi au vendredi, mais se prolonge le weekend. Le turn-over des patients est important, et ceux d’entre eux qui sont plus permanents ne sont pas toujours en capacité de suivre une activité. Lorsqu’ils sont en crise aigüe par exemple.
La disponibilité du personnel soignant est elle aussi à prendre en compte. En semaine, il est plus difficile de proposer des activités dans la mesure où la charge de travail est plus importante (admissions, réunions, entretiens médicaux…). Pour autant, les activités thérapeutiques sont une respiration bienvenue dans le cadre hospitalier.
Rappelons que la plupart des soins en psychiatrie mettent l’infirmier en relation conflictuelle avec le patient, qui est parfois soumis à une obligation de soins par un mode d’hospitalisation sous contrainte (SDT , SDRE …). La négociation de prise de traitement, l’injection contre sa volonté, la mise en chambre d’isolement…Tous ces éléments induisent un rapport de force soignant / soigné.
Les patients n’ont pas du tout la même représentation du soignant dans le cadre du soin quotidien ou dans celui de l’activité. Tomber la blouse permet de changer le contexte et ce changement de perspective bénéficie aux deux parties.
Lors de l’atelier, les patients ne subissent plus le soin mais en deviennent acteurs. Le patient ne donne pas à voir la même chose au sein du service qu’au sein de l’activité. Dans une posture d’insécurité au quotidien, il peut se positionner en leader d’un groupe de médiation.
De son côté, le soignant prend de la distance par rapport à une situation de blocage. On crée un moment propice au transfert positif dans une démarche d’alliance thérapeutique. Sans oublier de prendre plaisir à l’activité, un plaisir qui s’avère communicatif.
Vouvoiement ou tutoiement, dans le public, le débat est animé :
Héloïse Wagner répond très franchement. D’après elle, le « tu » n’est pas gage de proximité et le « vous » n’est pas gage d’éloignement. Pour autant, il lui arrive de passer du vouvoiement au tutoiement avec le même interlocuteur, si la situation change, pour un rétablir une position d’autorité par exemple.
• Certaines activités induisent le tutoiement : le sport, la pâtisserie… Mais il ne faut pas changer en fonction du moment, au risque de créer une confusion. On peut sembler incarner deux personnes. D’ailleurs, on apprend aux étudiants à rester vigilants sur ce point.
Manifestement, il n’y aucune confusion dans la tête des patients. On peut même jouer de cette dualité. Encore une fois, il faut agir en fonction de chaque personnalité. Ce qui fonctionne avec Héloïse ne fonctionnera pas avec un autre soignant. Sur ce sujet précis, aucune ligne de conduite ne peut être érigée en règle. Le soignant doit trouver « sa » solution au fur et à mesure de sa carrière.
Contributions
Programme de la journée à télécharger
Compte rendu de la journée : Anne Sarradet
Relu DCOM et promoteur des journées
Illustration Philippe Cusse
Contacts pour les enseignements cliniques
Direction des soins, promoteur des journées
Nadine Chastagnol, coordinatrice générale des soins
Muriel Lycke, cadre supérieur de santé
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Tél. 01 43 09 33 54
Mise à jour : 26.02.2015