Le parc de Ville-Evrard s’est remis au vert
Construit en 1862 sur les dépendances du vaste domaine de Ville-Evrard, l’établissement psychiatrique de Ville-Evrard se distingue par la valeur historique de son patrimoine bâti mais aussi par la richesse et la diversité de ses grands espaces paysagers, classés et protégés. Bois, chemin de halage, prairies, pelouses, herbes folles, bosquets fleuris, alignements d’arbres remarquables, jardins pavillonnaires et jardins potagers composent un parc naturel et semi-naturel de 58 hectares le long du canal de Chelles et de la Marne. Depuis 5 ans, sous l’impulsion de Michel Bourrié, responsable des espaces verts, l’équipe des 9 jardiniers de l’établissement vise l’excellence environnementale. Pour restaurer et préserver la biodiversité de ce patrimoine d’exception, elle a adopté des méthodes de gestion durable qui déjà font leur preuve…
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Renouer avec des pratiques écologiques
Les 9 majestueux séquoias qui, du haut de leur 40 m, dominent les bâtiments historiques et les promenades couvertes du quartier de l’Asile, la partie la plus ancienne de l’établissement, sont un symbole de l’efficacité des nouvelles pratiques écologiques mises en œuvre par les jardiniers de l’EPS de Ville-Evrard. Malgré leur aspect robuste, ces arbres classés sont sensibles au changement climatique. La moitié d’entre eux, fragilisée par des périodes de sécheresse intense, commençait à jaunir et dépérir. Une catastrophe patrimoniale ! « Afin d’éviter un tassement du sol au pied des séquoias et de former un couvercle de protection anti-dessèchement, nous avons simplement pris le parti de ne plus tondre l’herbe autour du tronc en période de frondaison » explique Michel Bourrié « et s’il fait très chaud longtemps, nous arrosons les pieds 24h d’affilée ». Résultats : les arbres ont retrouvé vigueur et santé, l’établissement a préservé son patrimoine et évité des dépenses d’abattage, de coupe et d’évacuation d’un bois non valorisable. « Au final, nous sommes écologiquement et économiquement gagnants » poursuit Michel qui a également rendu à la nature les cheminements piétons de l’établissement depuis qu’il a banni désherbants, insecticides et matériels d’épandage. L’herbe a donc recolonisé la promenade située entre la double rangée de grands marronniers qui donne son caractère royal à l’allée centrale de l’établissement. Depuis cette promenade, on aperçoit entre les portiques en pierres un pied de tabac venu se planter tout seul au pied d’un arbre, de grands magnolias odoriférants au vert profond, des tamaris aériens, un aubépinier en bataille…
Protéger l’équilibre d’un réservoir de biodiversité autour du canal
Dans la partie la plus sauvage du parc, le long du canal de Chelles où circulent péniches, bateaux de plaisance, VTTistes et promeneurs, les jardiniers ont laissé la nature reprendre ses droits, tout en maîtrisant son développement. L’EPS de Ville-Evrard est responsable de la gestion des espaces boisés aux essences variées des berges du canal de Chelles. Son chemin de halage offre sur 2,5 km un paysage typique des bords de Marne. « Nous évacuons les arbres tombés à terre dont nous faisons du bois de chauffe, nous repérons et élaguons les sujets trop hauts qui dépérissent pour laisser leurs voisins se développer » explique Michel Bourrié. Un petit bois, un étang et une prairie recouvrent désormais ce qui fut autrefois un vaste domaine agricole avec des cultures de blé et de maïs, des pâtures pour des vaches et des taureaux, un élevage de porcs…
Autour de l’étang s’épanouissent désormais des aulnes, des saules pleureurs, des cornouillers, des saules tortueux, des tilleuls, des merisiers, des frênes, des aubépines très mellifères, des buddléias chers aux papillons, des hibiscus, des ronciers et des érables que les jardiniers sélectionnent et suppriment en nombre parce que cette essence n’est pas adaptée aux bords d’eau. Depuis que les jardiniers ont décidé de ne plus tondre systématiquement la prairie qui borde l’étang, des fleurs sont réapparues : des chardons, des orchidées épipactis des marais et de belles graminées... Les fruits, graines, cônes, duvets de cette végétation diversifiée ont enrichi la faune comme le détaille Michel, fin observateur du retour de la vie animale dans ce parc où il travaille depuis 1977 : « les chardonnerets, seuls oiseaux aptes à prélever les graines de chardons sans se piquer les pattes grâce à leur bec effilé, sont revenus, comme les tarins des aulnes qui se nourrissent des cônes des aulnes et arrivent l’hiver par colonies. En 2014, nous avons vu aussi des bernaches apprendre à leurs petits à picorer les graminées ! ». Colverts, cygnes, foulques, poules d’eau, sarcelles d’hiver, hérons, faucons, hérissons, fouines, renards, écureuils, abeilles et papillons complètent le bestiaire. Dans les eaux peu profondes de l’étang, les poissons sont plus rares depuis que des cormorans ont fait des descentes plusieurs hivers de suite pour attraper gardons, brochets et sandres. Mais des moules d’eau, signes de bonne qualité des eaux, atteignent une taille souvent impressionnante.
Une nouvelle gestion des pelouses et prairies
Dans les espaces plus ordonnés du parc, tout autour des bâtiments administratifs et des pavillons de soin, l’équipe de jardiniers assistés de stagiaires compose et entretient 25 bosquets de fleurs qu’elle cultive elle-même sous serres. Depuis 5 ans, elle gère les gazons comme la prairie de l’étang avec des surfaces tondues et des parties naturelles où poussent librement des graminées, des coquelicots, des campanules, des sauges et de grands séneçons de jacob jaunes dont le développement est soigneusement maîtrisé parce que cette plante est toxique pour les chevaux et les bovins. « Ces nouvelles pratiques sont durables dans la mesure où elles encouragent la diversité des écosystèmes tout en réduisant les coûts de carburant et d’entretien de machines de tonte. Nous sommes plus écologiques qu’auparavant avec une équipe moins nombreuse » analyse Michel qui échange ses bonnes pratiques de gestion des espaces verts avec d’autres établissements hospitaliers. Les jardiniers gardent aussi un œil attentif sur les arbres isolés remarquables qui s’épanouissent dans les différents quartiers du parc : les mélèzes, tilleuls, pins noirs d’Autriche, platanes, érables champêtres et les noisetiers « garde-manger » des écureuils du quartier de la Maison de santé ; les cèdres, peupliers, acacias, tamaris et le haut tulipier de Virginie et l'arbre à kiwis planté dans le jardin d’un pavillon du quartier des Manivelles . « 39 ans après mon premier jour d’activité à l’hôpital, je reste ému de travailler dans ce coin de campagne si proche de la ville. Il offre un havre de paix aux patients comme aux collaborateurs de l’hôpital » conclut Michel Bourrié.
Contributions
CF com
Jocelyne Chatron
Photo
Jorge Alvarez
Mise à jour : 21.03.2017