Un pôle qui soigne son attractivité
Le pôle G04 dessert trois communes de Seine-Saint-Denis : la Courneuve, Dugny et Stains. Depuis l’arrivée du Dr Fayçal Mouaffak à sa tête le 18 janvier 2016, le nombre d’actes ambulatoires a bondi de 30%. Pour optimiser la qualité de la prise en charge d’une des files actives de patients les plus importantes de l’EPS-VE (2 826 patients en 2015), motiver les équipes en place et attirer d’autres soignants, le Dr Mouaffak a pris plusieurs décisions structurantes. Avec succès !
Les deux internes du pôle, Marion Labaeye et Lizenne Adnet, ont choisi le G04 en raison du caractère particulièrement formateur et enrichissant du stage proposé. Arrivées en novembre 2016, elles gèrent, la prise en charge de patients hospitalisés au sein de l’Unité d’hospitalisation temps plein (UHTP) du pôle, situé à Saint-Denis face au Centre Hospitalier Delafontaine. Elles s’occupent de l’entrée des patients, psychotiques pour la plupart, organisent leurs soins, suivent leur évolution clinique et gèrent leur sortie.
Les internes en première ligne sur la psychiatrie liaison
Elles ont, en plus, l’opportunité d’assurer la liaison psychiatrique au CH Delafontaine. « Nous répondons aux demandes des services médicaux et chirurgicaux de l’hôpital qui sollicitent une aide psychiatrique pour leurs patients » explique Marion Labaeye. « Après un tri des demandes – environ 10 par semaine - et une évaluation de leur degré d’urgence, nous intervenons pour donner un avis ponctuel au terme d’un entretien de 30 mn à 2h avec le patient : faire une évaluation médico-psychiatrique, décider d’une hospitalisation en psychiatrie, orienter le patient vers la bonne structure de prise en charge ou réévaluer le traitement d’un patient sous psychotropes ». Si elles gèrent seules ces demandes, les deux internes sont supervisées par un médecin senior. Après chaque consultation, elles établissent un compte rendu structuré et échangent avec un praticien senior pour décider de la marche à suivre. Le compte-rendu, visé par le senior, est adressé au psychiatre traitant et au médecin traitant du patient ainsi qu’au correspondant du service hospitalier demandeur. « Au-delà de l’autonomie qu’elle nous donne, la liaison nous confronte à des pathologies psychiatriques peu présentes en UHTP : des dépressions légères, des deuils pathologiques » analyse Marion. « Elle permet aussi d’appréhender le lien entre pathologies psychiatriques et pathologies somatiques, fréquent dans les maladies inflammatoires ou infectieuses ou neurologiques. Nous avons vu un cas de neuro-paludisme et un cas de neuro-syphilis » ajoute Lizenne.
Un roulement aux urgences du CH Delafontaine
Autre particularité du stage, les internes ont la possibilité d’accompagner ½ journée par semaine un psychiatre senior en roulement aux urgences du CH Delafontaine, pour faire de la prise en charge psychiatrique au sein du Service d’Accueil d’Urgence (SAU). « Les urgences nous apprennent les bons gestes pour la prise en charge et l’orientation d’un patient que l’on connait pas du tout, souvent en pleine décompensation. C’est aussi très formateur » affirme Marion.
Ces particularités ont conduit le Dr Mouaffak à redéfinir et encadrer, par des chartes, les procédures de fonctionnement du pôle avec les médecins du CH Delafontaine ce qui contribue à fluidifier les échanges.
Pour améliorer encore la prise en charge des patients du SAU – par exemple celle des suicidants dont on sait qu’ils récidivent dans 20% des cas - le G04 réfléchit avec le CH Delafontaine à la mise en place d’une unité de psychiatrie adulte de courts séjours, attachée au SAU.
Une prise en charge fluidifiée en CMP
En positionnant les internes en première ligne de la liaison et en organisant un roulement des psychiatres du pôle au SAU, le Dr Mouaffak a dégagé du temps médical redéployé sur les deux Centres médicaux psychologiques (CMP) de Stains et de la Courneuve. « Le temps d’attente pour obtenir un premier entretien infirmier puis, si nécessaire, un entretien médical, a été ramené de plus de 6 mois à moins d’1 semaine ce qui a désengorgé les urgences auxquelles les familles finissaient par s’adresser » constate le Dr Mouaffak. Pour suivre les patients sous traitement retard et sous programme de soins, le G04 a mis en place un outil de traçage et de monitoring spécifique. Le Dr Detaint a rejoint l’équipe en tant qu’assistant spécialiste en novembre 2016 et le Dr Falazi, futur PH, viendra renforcer l’effectif médical en mai 2017. Le pôle pourra donc compter sur une équipe médicale de 9 seniors, 2 internes DES et 2 faisant fonction d’interne (FFI).
Des infirmiers « case managers » en UHTP
De jeunes infirmiers ont également rejoint le G04 en 2016, attirés par les responsabilités qui leur sont confiées au sein de l’UHTP de Saint-Denis. « A mon arrivée, j’ai donné aux infirmiers un rôle de « gestionnaires de cas » pour gérer la situation clinique très problématique, tant au niveau thérapeutique qu’au niveau de l’élaboration d’un projet de vie, d’un certain nombre de patients hospitalisés depuis longtemps. J’ai instauré des réunions de travail régulières sur ces cas lourds de patients relevant davantage du médico-social que du médical » explique le Dr Mouaffak. Les infirmiers sont des référents bien identifiés. Ils jouent un rôle de pivot au milieu des différents intervenants : avec le psychiatre traitant, ils articulent la prise en charge médicale, éducative et sociale de ces patients souvent atteints de pathologies chroniques et invalidantes. Les infirmiers apprécient : cette mission de « case manager » les responsabilise, leur donne de l’autonomie et libère leur créativité.
Un enseignement scientifique
Le Dr Mouaffak a également mis l’accent sur la formation scientifique des internes en lançant le 30 janvier 2017 un séminaire de psychiatrie biologique et de psychopharmacologie. Dispensé par le Dr Mouaffak ou d’autres praticiens hospitaliers, cet enseignement intitulé « les lundis du 93/4 » se déroule le lundi de 14h30 à 16h sur 4 mois. Ses thématiques touchent au cœur de métier. Elles s’intéressent aux formes cliniques complexes et aux innovations thérapeutiques abordées sous l’angle de «l’evidence-based medecine »: « les états mixtes », « la catatonie », « les catatonies pharmaco induites », « les thymorégulateurs », « les antidépresseurs », « l’électroconvulsiothérapie », « initiation à l’épidémiologie en psychiatrie ». Le sujet de clôture « biomarqueurs de la transition psychotique » donnera la parole, en soirée du 24 avril 2017, au Dr Oussama Kebir prix des sciences biomédicales de l’UNAFAM en 2016.
Et des projets de recherche clinique
La recherche n’est pas en reste. « Je demande à chaque interne de travailler sur une publication au cours de son stage » prévient le Dr Mouaffak. Trois projets sont en cours d’étude au sein du pôle :
- Le « suivi clinique, psychiatrique et métabolique des patients sous Zypadhera », un antipsychotique injectable à effet retard peu étudié jusqu’à présent. Il s’agit d’un projet d’amélioration des soins monté par une Interne FFI en collaboration avec l’équipe de la pharmacie.
- L’étude d’un cas de patient présentant une schizophrénie ultra-résistante et chez lequel a été découverte une anomalie génétique rare.
- Le dernier sujet auquel le Dr Mouaffak est particulièrement attaché concerne les suicidants. Il s’agit d’un projet de thèse visant à identifier les particularités socio-démographiques et cliniques liant les suicidants des 3 villes couvertes par le secteur (La Courneuve, Dugny et Stains) et à caractériser des déterminants de l’engagement dans les soins pour ces patients. «434 suicidants se sont présentés aux urgences du CH Delafontaine en 2015. 60% ont été renvoyés chez eux avec une proposition de suivi. Nous n’avons pas de visibilité sur leur degré d’engagement dans les soins. Sachant que le taux de récidive est de 20%, je souhaite mettre en place des outils de veille sanitaire permettant d’assurer un engagement dans le soin. La recherche en cours nous aidera à déterminer les outils les mieux adaptés à chaque profil de suicidant : rappel téléphonique, envoi d’un courrier, intervention psycho-thérapeutique… » explique le Dr Mouaffak.
Autre projet structurant pour l’avenir, sur lequel toutes les équipes médicales du secteur travaillent déjà : le regroupement des structures extra hospitalières - deux centres médico psychologiques, deux centres d'accueil thérapeutique à temps partiel et un hôpital de jour - actuellement trop dispersées sur un seul site à la Courneuve.
Contributions
Texte
CF.com
Photos
Jorge Alvarez
Mise à jour : 20.03.2017